Le temps dans Waryaume est comme une énorme boucle composée de 3 saisons influencées par 3 dieux : Argone (hiver), Irkay (printemps) et Shibaya (été automne). Ces 3 saisons constituent une année appelée une legacy. A chaque saison les habitants du monde de Waryaume honore les dieux par des rituels & des coutumes
Voici l’histoire de la toute première Legacy, une époque où les dieux et les mortels se croisaient encore dans un monde façonné par l’équilibre précaire des puissances divines.
Le ciel se para d’une obscurité surnaturelle. Ce jour-là, une éclipse totale enveloppa Waryaume, plongeant le monde dans une nuit glaciale. C’était un moment rare et redouté, car une éclipse marquait l’intervention de Kaïros, le dieu du temps et maître de l’éternité.
Kaïros, imposant dans son armure d’ombre et de lumière entrelacées, convoqua ses deux fils, Argone, seigneur des ombres et de la mort, et Irkay, porteur de lumière et de vie. Leur sœur, Shibaya, déesse de la fertilité, observait de loin, inquiète des conséquences de cette rencontre tandis que Kharon inspirait le peuple novien à lui vouer son culte.
Kaïros avait senti une instabilité croissante dans l’équilibre du monde. Les créations d’Argone, sombres et corrompues, s’opposaient de plus en plus violemment aux êtres de lumière et de pureté d’Irkay. Un conflit éternel semblait inévitable. Ainsi, Kaïros, dans sa sagesse, leur imposa un jugement :
“Vous partagerez le cycle des saisons et veillerez sur le monde en harmonie. Mais souvenez-vous, tout déséquilibre dans vos actions aura des conséquences irréversibles.”
Ce pacte donna naissance à un enfant miraculeux garant et témoin de l'équilibre des deux frères. Malgré ce pacte, une tension palpable subsistait entre les deux frères, leurs regards se défiant dans la lueur irréelle de l’éclipse.
Le ciel s'était teint de nuances irréelles, une symphonie de ténèbres profondes et d'éclats dorés dansant sur l'horizon. Au zénith, une éclipse divine suspendait le temps, le monde entier semblant retenir son souffle. Les vents, chargés de murmures cosmiques, parcouraient les terres comme si la création elle-même se préparait à un événement sans précédent.
Au sommet de cette union céleste, un fracas éthéré déchira l'air. Une onde vibrante, à la fois lumineuse et obscure, jaillit des cieux et balaya le monde. Les montagnes tremblèrent, les océans se figèrent, et les forêts se courbèrent dans un silence respectueux. Là, dans ce vortex de forces opposées, une silhouette émergea lentement. Elle semblait flotter entre les dimensions, entre l’éclat incandescent d’Irkay et les ombres voraces d’Argone.
Abbadon était né.
Son corps scintillait comme un miroir brisé reflétant mille vérités : tantôt éblouissant d'une lumière dorée qui évoquait la vie et l'espoir, tantôt absorbant toute clarté, transformant les environs en un abîme insondable. Ses yeux, insondables, contenaient des galaxies tourbillonnantes, un puits infini de sagesse et de mystère. Sa présence transcendait les mots, élevant les cœurs autant qu’elle glaçait les âmes.
Kaïros, le père du temps, apparut dans une aura intemporelle, sa voix résonnant comme une vague qui se brise sur les rivages de l’éternité.
— "Que cet enfant soit le gardien de l’équilibre entre vous," déclara-t-il, ses paroles gravées dans le tissu même de l’univers. "Il portera en lui votre dualité, vos forces et vos faiblesses. Sa destinée sera d’être le phare dans les tempêtes, le guide des âmes et l’arme contre le chaos."
Argone, son regard sombre brûlant de défiance, s'avança le premier. Une froideur palpable enveloppa l’air alors qu’il tendait une main éthérée vers l’enfant.
— "Je te donne la force des ombres," dit-il, sa voix rauque comme une lame fendant la nuit. "Tu commanderas aux morts, car la peur et le silence sont des armes puissantes."
Irkay, auréolé d’un halo doré, s'approcha à son tour, la lumière s’intensifiant autour de lui comme une aube naissante. Ses traits, empreints d’une infinie bonté, contrastaient avec l’austérité d’Argone.
— "Je te bénis de la lumière," murmura-t-il, chaque mot vibrant d’harmonie. "En toi résidera le pouvoir de soigner et de purifier, de porter l’espoir là où tout semble perdu."
Ainsi, Abbadon reçut son héritage, un fragile équilibre entre l’obscurité et la lumière, entre destruction et renaissance.
Lorsque les cieux reprirent leur cours, l’éclipse marquant la naissance d’Abbadon s’éclipsa doucement, laissant derrière elle un calme étrange, comme si le monde méditait sur ce qu’il venait de vivre. L’enfant divin, porteur d’une destinée insondable, fut déposé par la volonté de Kaïros sur les hauteurs des collines de Valdornis.
À cette époque, Valdornis n’était qu’un modeste hameau, niché entre des vallées verdoyantes et des rivières cristallines. Les champs ondoyaient sous le vent, et les collines baignées d’une lumière dorée semblaient endormies dans une paix intemporelle.
C’est là, au détour d’un sentier bordé de fleurs sauvages, qu’Aeryne, une paysanne au cœur tendre, découvrit l’enfant. Il reposait dans une clairière, enveloppé d’un voile immatériel mêlant ténèbres et lumière, ses pleurs résonnant comme un chant lointain, empreint de mystère.
Elle se pencha, ses doigts tremblant d’émotion, et prit doucement le bébé dans ses bras. Une chaleur rassurante, douce comme un rayon de soleil printanier, emplit son être, suivie d’un frisson glacial qui semblait murmurer les secrets des étoiles.
— "Milos !" appela-t-elle, sa voix vibrante d’un mélange de crainte et de fascination.
Milos, un homme robuste au regard sage, accourut, son souffle se suspendant lorsqu’il aperçut l’enfant. Il s’agenouilla aux côtés d’Aeryne, ses yeux scrutant ceux du bébé, où une lueur d’étoiles semblait danser.
— "C’est un miracle," murmura-t-il, la gorge serrée. "Cet enfant... il n’est pas comme les autres."
Aeryne, une larme coulant sur sa joue, berça doucement le nourrisson.
— "Il est à la fois lumière et ténèbres," dit-elle dans un souffle. "Mais il est à nous maintenant. Ce sera notre lumière dans les ombres."
Le couple, ignorant les origines divines de l’enfant mais sentant le poids de sa singularité, décida de l’élever comme leur propre fils. Dans leur modeste chaumière, nichée au cœur de ces terres fertiles, Abbadon grandirait, guidé par l’amour simple mais puissant de deux mortels.
Et ainsi débuta la vie d’Abbadon, né d’une collision céleste, porteur d’une destinée écrite dans les étoiles, mais élevé parmi les hommes pour apprendre leur fragilité, leur force et leur humanité.